À chaque année, quand arrive le temps de l’encan, notre espace galerie déborde. De haut en bas, de gauche à droite, les murs sont remplis à ras bords. Ils sont tapissés d’une centaine d’œuvres d’art. Les tableaux cohabitent avec des sculptures, des céramiques et des icônes.
Chaque oeuvre raconte une histoire. Derrière chacune se cachent des visages. Elles ont été offertes à La Clarté-Dieu par des artistes ou des collectionneurs pour son encan annuel. Les cadeaux sont toujours chargés d’un message. C’est un signe visible d’amitié.
Se côtoient sur les cimaises de grands noms de la peinture autant que des artistes émergents, des automatistes et des figuratifs, des paysagistes et des portraitistes, des graveurs et des émailleurs, des jeunes et des plus anciens. Ils forment une famille et ensemble, ils chantent une parole qui pourrait être la nôtre. On se retrouve, on se reconnaît, dans leurs gestes et leurs manières. Déjà, les visiteurs nombreux pressentent derrière cette exposition beaucoup plus qu’une simple levée de fonds.
Un soir, au moment de la prière, j’ai eu du mal à me concentrer et à fixer mon coeur sur les mots des psaumes. Mon esprit se promenait au-dessus de cette mer immense de générosité et quelque chose a bougé au fond de moi. Un sentiment de reconnaissance m’a envahi et un chant d’action de grâce a surgi sur mes lèvres.
Il faut bien l’admettre. C’est un vrai miracle qu’une œuvre comme la nôtre soit rendue possible uniquement par des dons de toutes sortes et par l’engagement soutenu de nombreuses personnes bénévoles. Cela depuis maintenant vingt-cinq ans.
Telle une mère nourricière, le dévouement et la charité donnent vie à La Clarté-Dieu et l’animent. Artistes, croyants, bénévoles, sympathisants, amis, donateurs, tous participent au même mouvement et donnent à voir les traces de lumière que tout être humain porte en lui malgré le poids de son histoire. La gratuité appelle la gratuité. Dans ce domaine, les oeuvres, qu’elles soient artistiques ou caritatives, valent souvent mieux que bien des discours. Elles donnent de l’espérance et traduisent une soif commune de voir se construire une indéfectible fraternité. Elles sculptent, petit geste par petit geste, une humanité nouvelle à qui elles ouvrent une fenêtre pour entrevoir l’avenir.
Est-ce que j’entends bien votre désir de voir se continuer la mission de La Clarté-Dieu? Vos dons, votre disponibilité, vos témoignages sont comme autant de tapes dans le dos qui donnent le goût d’avancer et forcent les pas à l’aventure.
Je ne suis donc pas le seul à croire que les artistes aident l’Église à mieux comprendre ce qui bouillonne dans le coeur des hommes et des femmes de notre temps. Ils disent, par leurs images, leurs gestes, leurs mots ou leurs musiques, les espoirs, les blessures, les rêves, les joies, les attentes, les cris, et les questions de leurs contemporains. Pas étonnant que leur parole dérange parfois puisqu’elle oblige à voir autrement. Tout cela est bien humain, mais très spirituel aussi. L’art permet de contempler l’invisible au coeur même de la réalité humaine et lève le voile sur le mystère de la présence amoureuse de Dieu pour chaque être créé à son image.
En échange, l’Église, quant à elle, doit continuer d’être servante et porteuse de l’Heureuse Nouvelle et d’ainsi faire cadeau de l’amour de Dieu afin que l’humanité y puise un bonheur sans fin.
L’effervescence de l’encan ne dure que quelques jours, mais toute l’année durant, nous avons le privilège d’être ensemble témoins de ce dynamisme qui nous fait espérer que quelque chose est en train de naître.
Et si nos tendresses, nos engagements, nos offrandes, nos oeuvres, étaient le frêle berceau dans lequel Dieu vient au monde?
L’avenir du monde est entre nos mains.
ROGER CHABOT